On dit de moi que je suis • invivable ϟ caractériel ϟ silencieux ϟ angoissant ϟ calculateur ϟ j'en demande et j'en fais trop ϟ insupportable ϟ n'assume pas mes erreurs ϟ travailleur ϟ cynique ϟ têtu comme une mule ϟ caustique ϟ méchamment séducteur ϟ joueur ϟ je fume trop et que je ne prends pas soin de moi ϟ bordélique ϟ faible physiquement ϟ malheureusement pas mentalement ϟ possède un humour trop noir ϟ tortueux ϟ incompréhensible ϟ je n'accepte aucun refus ϟ très ordonné dans ma tête ϟ  je joue de ce que j'inspire chez les autres ϟ boudeur ϟ colérique et susceptible ϟ addict à la nicotine et autre substances ϟ menteur ϟ malgré ce que je laisse croire, je m'attache vite ϟ étrange et fort atypique ϟ soit je chuchote soit je crie  ϟ charismatique ϟ frustré ϟ blessant ϟ certains me trouvent étrangement attachant ϟ familier ϟ néfaste ϟ poison ϟ cachottier ϟ infidèle ϟ cherchera toujours à bloquer mes pulsions ϟ souffre constamment ϟ effrayé par moi-même et par cette capacité à faire du mal aux autres ϟ Arrivera toujours à blesser autrui, toujours et sans parcimonie


Mais au premier abord je suis •

Lamia a toujours choqué, par sa physiologie. Il s’est toujours démarqué. Son physique n’a rien de normal, il reste humain, mais humainement bizarre. Et il ne fait rien pour arranger cette impression. Quand on voit Lamia pour la première fois, les émotions se dispersent pour mieux s’assembler, c’est un chaos de ressentis souvent inversés. Il y a la peur, il y a l’intrigue, un soupçon de mystère et cette fascination morbide. Quand on connait Lamia, quand on a vu Lamia pour la première fois, cette phrase nait de nulle part, et décrit affreusement bien le personnage.

Lamia est monstrueusement beau.

Il fait honneur à ce qu’il est, à ce qu’il a été, à la mythologie qui l’a fabriqué. Lamia est beau, et monstrueux. Il est laid, et attirant. Lamia était une femme, une femme aux traits séduisants, une femme qui attirait et séduisait pour mieux se transformer en une ignoble monstruosité et tuer. Ses cibles étaient des jeunes hommes. Lamia est l’aspect physique de ce monstre mythologique. Son histoire se lit sur ses traits.

Physiquement, Lamia est à moitié humain, à moitié monstre. Il est laid et beau. Et qu’importe tous ses efforts pour détruire ses traits fins, il reste attirant. Ce n’est pas faute d’essayer, en prenant des substances dangereuses, illicites et ignobles, car Lamia a faim.

Les yeux de Lamia sont affamés, frustrés.

Cette particularité lui est restée, il a besoin de séduire encore et encore pour mieux blesser. Il a besoin de ça. Il est affamé de ce désir ; caresser, chuchoter, embrasser, prendre les cœurs des hommes pour mieux les empoigner, les arracher, les émietter…Lamia souffre de cette dépendance, il s’empêche d’agir ainsi, il s’empêche et il se fatigue de plus en plus. Il n'arrive plus à réfréner ce désir, cette bête noire. Son corps est maigre, son âme est affaiblie, sa peau est maladivement pâle, et ses côtes saillantes. Le monstre se lit en lui. Ses yeux souvent embrumés par les drogues qui atténuent sa souffrance, ils sont d’un rouge carmin, féroce, des yeux de biche féminins. C'est un androgyne. Terriblement androgyne. Il est mince, si mince, ses joues sont creuses, ses lèvres peu pulpeuses, son nez est petit et son visage à moitié caché sous sa chevelure emplumée.

Il ne prends pas soin de lui, il est négligé, exécrable, il tente de s’éloigner. On veut se rapprocher, toucher ces plumes d’un blanc sale qui poussent sur son crâne, dans la broussaille immaculée qui lui sert de chevelure. Elle couvre un de ses yeux, son faciès anguleux. Elle descend sur son torse grisâtre, le rendant d’albâtre. On veut caresser ces ailes blanches et noires, implantées dans son dos creux, un contraste interne-externe sulfureux. Elles ne lui permettent pas de voler, elles ne sont pas assez grandes, par contre, assez fébriles pour être cassées sans effort. Et ses mains, longs doigts fins, crochus, griffus…Noires. Sa peau grisée devient charbonneuse, des ses avant-bras, dès ses tibias. Ses pieds et ses paumes sont de geais, et rappellent plus les serres d’un oiseau charognard que quelque chose d’humain.  Sourcils froncés, gueule d’ange démoniaque, il ne fait rien pour se valoriser, et il attire malgré tout. Il ne veut pas, il en a assez. Il est une saloperie qui souhaite s'effacer, vivre autrement, pleinement, autrement qu'en étant néfaste.

Détruis-toi. Détruis-toi. Se hurle-t-il.

Lamia, sur Pandore, cherche un moyen toujours plus puissant de s’éloigner, de ne pas blesser. Sa drogue est ainsi, envoûter les cœurs pour les arracher, c’est son chemin de vie. Il tentera inlassablement de s’en échapper, de contrer par les autres drogues cette drogue. Ses cernes s’étendent, son corps s’amaigrit, mais cette faim demeure, et l’illusion devient peu à peu inutile. Un drogué. Un drogué aux vêtements excentriques, à la minceur inquiétante, à la beauté envoutante, au caractère ignoble et au regard perçant. Un putain de drogué affalé contre un mur, tenant pitoyablement son calumet à la main, sa respiration tremblante, ses iris voilées, sa fébrilité attirante, son odeur de renfermé…

Lamia est majestueusement hideux.

Tisse. Tisse encore et encore. Oublie. Laisse-toi aller dans les fils, les manches, les fermetures. Ne plus réfléchir. Se droguer, se droguer aux aiguilles et aux épingles. Tisse. Crée. Ne t’arrête pas. Tu ne souffres pas quand tu tisses, alors tisse. Tisse à en perdre tes doigts, à en perdre ton corps. Jusqu’à l’aurore.

« Idiot. »

Idiot de Zeus. Stupide Héra.

Lamia aurait été une femme, une de ces princesses dont on voudrait l’existence et la beauté. Une telle beauté qu’elle enivra le Dieu des dieux grecs, qu’elle apporta le courroux d’Héra. On n’attise pas la jalousie d’une déesse, jamais.

Blesse. Mords. Dévore. Séduis. Pousse à l’agonie.

Ses traits se sont enlaidis, et sous la colère elle devenait monstre. Zeus lui donna la capacité de s’ignorer, de ne plus observer sa laideur. Et Lamia continuait, elle tuait les enfants des autres, à trouver son bonheur dans la souffrance des gens. C’était un monstre dans le corps d’une belle.

Blesse. Mords. Dévore. Griffe. Séduis. Pousse à l’agonie. Encore et encore.

Lamia pleurait ce désir, cette envie insatiable de charmer les jeunes hommes afin de les tuer. Oh, son plaisir indicible quand elle massacrait leur cœur, après l’avoir conquis…Et cette souffrance qui suivait à jamais. Lamia haïssait ce qu’elle était, ce qu’elle faisait, et elle ne pouvait s’empêcher d’agir ainsi. Elle en avait besoin, besoin de faire mal pour subsister. Terriblement mal.

Et le noir instable qui suivit ses pires agonies.

Lamia est arrivé à Pandore, changé. Comme une punition, il était mi-humain, mi-monstre. L’humanité qui attirait, et le monstre qui repoussait. Il y a vingt-cinq ans, il s’effraya des technologies, il se perdit dans toutes ces choses étranges et nouvelles, fascinantes et angoissantes. Pour la première fois, il ne désirait pas faire du mal.



Lamia, un homme, un homme aux traits féminins masculins, et aux allures inhumaines. Il. Lamia était un homme, plus de courbes, plus de poitrine avantageuse, plus de beauté sulfureuse. Il était un homme parmi les hommes, les auteurs, les créations. Une nouvelle vie, il ne désirait plus blesser, tuer. Il était homme.

Pourtant, personne n’avait dit qu’un homme ne pouvait en blesser un autre.

Au début, il trouva des petits boulots, il attirait le regard, il aimait ça, il aimait cet homme. Un inconnu connu, il était doux. Il lui manquait quelque chose, à Lamia. Quelque chose…Et il l’ignora. Ce manque empira. Oiseau de mauvaise augure, qui frappe, qui ne comprend pas.

Que me manque-t-il ? Pourquoi ai-je faim ? Pourquoi ai-je mal ?


 

Lamia blessa cet homme, Lamia alla voir ailleurs, Lamia effleurait les peaux et faisait hurler les cœurs. Le cercle se répétait, la malédiction d’Héra continuait. Lamia s’enfuit, courut se réfugier autre part, nulle part, loin des autres pour ne plus blesser et être blessé.

Salopard. Connard. Idiot. Ignoble créature. Gigolo. Égoïste. Lamia. Sale Lamia.

Il voulait arrêter ce cercle vicieux, comment, où, quand ? Lamia fixa la vitrine de cette boutique, Lamia entra.

« Sais-tu tisser ? » dit le vieil homme.
« Autant que je sais aimer. »
« Tu ne sais pas, dans ce cas. »

Les rumeurs allaient bon train. Lamia sourit avec ironie. Le vieil homme le fixa par-dessus ses lunettes. Il ne s’est jamais intéressé à ce qu’il était ; auteur, création, indépendant, c’était un vieil homme qui lui apprenait l’art de coudre. Lamia, il aimait cela, Lamia il oubliait. Et Lamia tisse, Lamia crée, Lamia expose et reprend la boutique du vieil homme, qui mourut à cause d’un caillou. Il a trébuché et il s’est cassé le cou. Toujours se méfier des cailloux.

Lamia reprit la boutique, Lamia crée, et Lamia est connu pour ses créations. Mais la qualité de ses œuvres est aussi réputée que son caractère. On ne voit que peu le Tisseur, on ne connait que ses œuvres et ses ventes, il reste enfermé, ne sort que de nuit. Car Lamia se drogue, la couture ne suffit plus. Il sent ce manque revenir, alors Lamia subit les drogues, les plus dangereuses, les plus illicites. La douleur l’enivre et le fait vomir. Lamia est pitoyable, Lamia est beau, Lamia est monstre. Son corps est terni, son âme rabougrie, et il ronge ses ongles quand il ne peut fumer convenablement. Il gagne sa vie, il est fameux, il est haï. Son argent passe dans les drogues, dans ce qui apaise ce manque terrible. Mais son corps s’habitue, les doses deviennent trop fortes, tout tourne autour de lui, et il gratte. Lamia gratte le parquet en quête d’un grain, d’une goutte, avide de sensations, d’un peu d’oubli. Et Lamia crie si tu lui parles. Lamia a mal, son cœur lui fait mal, son estomac se cramponne à ses côtes et son cerveau rit de sa maladie. Tout ça dans un appartement à l'atmosphère étouffante, aux fenêtres barricadées, à l'odeur puante.

Bientôt. Bientôt, lui murmure-t-il.

Bientôt…

Lamia, c’est le couturier, le tisseur, la beauté ignoble. Lamia, c’est l’homme à qui tu donnes le verre en cristal le plus fragile, rare et merveilleux au monde, et qui le laisse se briser au sol. Alors, son sourire s’étire du plaisir de voir les morceaux éparpillés, ses larmes creusent ses joues de n’avoir su le garder. Te faire du mal est un besoin.

Un chuchotis pendant que tu es endormi.

Blesse. Mords. Dévore. Griffe. Séduis. Pousse à l’agonie. Encore et encore. A jamais et pour toujours.

A jamais. Et pour toujours.